Un soir, vers minuit, à la limite du Bois, Colette Piat s'aperçut avec inquiétude que son véhicule tombait en panne... Des belles de nuit vinrent à son secours... Après leur départ, elle réalisa qu'il ne s'agissait pas de « femmes » ordinaires...
Elle ne les a jamais oubliées. A cause de cette rencontre, de ce secours inespéré, l'auteur a voulu interroger les autres, celles que l'on nomme traditionnellement les "travestis", alors que le mot lui-même apparaît dans la réalité comme une erreur grossière.
Marie-Andrée, féminisée par les médecins nazis ; Eva, ouvrière de cinquante-cinq ans, qui perçoit un salaire réduit depuis son opération ; Lucrèce, choisie entre plusieurs mannequins pour une photographie publicitaire de mère de famille ; Chimène, asservie par un compagnon "phallocrate" ; Jeanne-Marie, séduite par l'homme de ses rêves qui se révéla être... une femme, toutes nous obligent à remettre en question nos idées et nos classifications traditionnelles, démontrant, par leur existence même, l'absurdité des préjugés touchant à la condition féminine et à l'homosexualité.
Mutants ? Femmes affligées d'un sexe masculin ? Les médecins s'interrogent encore vainement à leur sujet ; ce qui est certain, c'est qu'elles sont à la fois recherchées sur le plan sexuel et pourchassées par la Police, la Justice et l'Administration qui leur refuse la possibilité d'obtenir des papiers d'identité conformes à leur morphologie, donc de travailler normalement. « Vous savez ce qu'est la société pour nous ? » explique l'une d'entre elles, « c'est une cage comme celle de Louis XI, vous ne pouvez ni vous coucher, ni vous lever, ni bouger, et pourtant, vous êtes vivante... » Le suicide est bien souvent la seule réponse qui leur est offerte ; il est grand temps d'intervenir sur le plan humain.