Ce qu'iels font au neutre : Analyse sémiotique des guides de communication inclusive au Québec francophone actuel [Thèse] / Loïs, Crémier ; Sylvano Santini (directeur de thèse) ; Alexandre Baril (codirecteur de thèse)

Main Author: Auteur, Crémier, Loïs, 1993-....Secondary Author: Directeur de la recherche, Santini, Sylvano;Directeur de la recherche, Baril, AlexandreLanguage: français.Country: Canada.Publication: Montréal : Université du Québec à Montréal, 2023Description: 1 vol. (ix ; 392 p.)Abstract: Cette thèse de doctorat en sémiotique examine la mutation actuelle de la notion de neutralité de genre dans le contexte de la valorisation des pratiques de communication écrite et orale inclusives de la diversité des genres, à travers l’étude des guides de communication inclusive produits au Québec francophone et publiés en ligne entre 2020 et 2021. Depuis quelques années au Québec, un nombre grandissant d’ouvrages s’attache à guider les pratiques de rédaction et d’expression orale vers un lexique plus épicène et des formulations plus neutres. Ces ouvrages émanent autant d’institutions reconnues que des locutorats queers, trans, non binaires et féministes à l’avant-garde des mutations de la marque du genre (grammatical) en français. Or, ce que signifie cet effet de neutralité demeure le plus souvent non défini dans les discours de justification de la communication inclusive et passe par une mobilisation à géométrie variable des notions de non-binarité, d’épicène et d’inclusif. La question que cette thèse pose est de savoir quel genre de genre neutre mobilisent, problématisent et reproduisent les guides de communication inclusive qui circulent actuellement au Québec francophone. Dans le premier chapitre, sur la base d’une revue de littérature large en études féministes, queers et trans et en études de genre, trois régimes d’interprétation du neutre sont présentés, c’est-à-dire trois effets de sens distincts de la neutralité. J’examine ensuite la circulation de ces interprétants du neutre dans cinq figures des positionnalités de « sexe/genre » (Gayle Rubin 1984) qui questionnent ou dépassent les représentations de la binarité homme/femme : le troisième sexe/genre, la lesbienne, les parcours trans, la non-conformité de genre et la non-binarité de genre. Dans le deuxième chapitre, un tour d’horizon des recours linguistiques mobilisés pour contourner, modifier ou confronter le fonctionnement de la marque du genre grammatical en français permet de présenter une typologie pragmatiste de ces interventions sur la grammaire en langue française : tandis que la rédaction épicène vise l’élision de la marque du genre, la féminisation ou « démasculinisation » (Louise-L. Larivière 2000) cherche à marquer le féminin (grammatical) ; la créativité linguistique non-binaire vise elle aussi à (re)marquer des positionnalités invisibilisées, mais elle marque plutôt des genres qui s’expriment au-delà de la binarité homme/femme, optique à laquelle l’approche du tumulte graphique (Julie Abbou 2011) par et pour des « genres dérangeants » (Alice Coutant 2019) s’oppose diamétralement. Le troisième chapitre s’attarde au pan théorique de la question de recherche et questionne la manière dont le point de vue linguistique sur la marque du genre façonne la conceptualisation du sexe/genre. Je propose que la mobilisation de la sémiotique peircienne (Charles S. Peirce 1992), lue au prisme des études féministes et trans via les travaux séminaux de Teresa de Lauretis (1987, 2007), permet l’examen de la co-production du système de genre et des normes linguistiques plutôt que de considérer les recommandations de communication inclusive comme un simple reflet d’un changement de paradigme culturel et social relativement au genre ou de conjecturer sur le genre (politique) sur la base de l’étude des stratégies linguistiques elles-mêmes. Le terrain privilégié pour l’analyse est le guide, considéré à la fois comme un « genre textuel » (Daniel Elmiger 2022) à part entière, au seuil du descriptif et du prescriptif, et comme un jeu de langage (Ludwig Wittgenstein 1961) à la charnière du témoignage et du texte de loi, propice à l’étude d’interprétants du sexe/genre en cours de « dé-re-construction » (de Lauretis 1987, p. 24). Le quatrième chapitre mobilise les classements présentés dans les deux premiers chapitres et le cadre sémiotique présenté dans le troisième chapitre pour mettre en évidence le travail de la marque du genre dite neutre dans neuf guides de communication inclusive produits entre 2020 et 2021. Le genre neutre comme un troisième ensemble d’identités de genre en sus de « homme » et « femme » est particulièrement présent dans le travail de l’effet de sens de notions d’épicène et de genre neutre grammatical. Aussi, si le travail de la notion de neutralité de genre est informé par une multitude d’agent·es avec des intérêts différents, voire contradictoires, on doit souligner que des pratiques de genrement issues des communautés trans y contribuent explicitement, tantôt en tension, tantôt en congruence avec les discours féministes sur la marque du genre. Enfin, la figure « non binaire » intervient dans les guides de communication inclusive, non pas comme une figure de transgression du système de genre ou un porte-étendard du dépassement de la marque du genre (grammatical), mais plutôt comme un troisième membre du système de genre pour justifier l’ajout d’un troisième genre grammatical, dans le contexte anglonormatif dans lequel ces contributions non binaires sont articulées.Subject: neutre | marque du genre | trans Online Resources:Click here to access online List(s) this item appears in: Travaux universitaires
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Cette thèse de doctorat en sémiotique examine la mutation actuelle de la notion de neutralité de genre dans le contexte de la valorisation des pratiques de communication écrite et orale inclusives de la diversité des genres, à travers l’étude des guides de communication inclusive produits au Québec francophone et publiés en ligne entre 2020 et 2021. Depuis quelques années au Québec, un nombre grandissant d’ouvrages s’attache à guider les pratiques de rédaction et d’expression orale vers un lexique plus épicène et des formulations plus neutres. Ces ouvrages émanent autant d’institutions reconnues que des locutorats queers, trans, non binaires et féministes à l’avant-garde des mutations de la marque du genre (grammatical) en français. Or, ce que signifie cet effet de neutralité demeure le plus souvent non défini dans les discours de justification de la communication inclusive et passe par une mobilisation à géométrie variable des notions de non-binarité, d’épicène et d’inclusif. La question que cette thèse pose est de savoir quel genre de genre neutre mobilisent, problématisent et reproduisent les guides de communication inclusive qui circulent actuellement au Québec francophone. Dans le premier chapitre, sur la base d’une revue de littérature large en études féministes, queers et trans et en études de genre, trois régimes d’interprétation du neutre sont présentés, c’est-à-dire trois effets de sens distincts de la neutralité. J’examine ensuite la circulation de ces interprétants du neutre dans cinq figures des positionnalités de « sexe/genre » (Gayle Rubin 1984) qui questionnent ou dépassent les représentations de la binarité homme/femme : le troisième sexe/genre, la lesbienne, les parcours trans, la non-conformité de genre et la non-binarité de genre. Dans le deuxième chapitre, un tour d’horizon des recours linguistiques mobilisés pour contourner, modifier ou confronter le fonctionnement de la marque du genre grammatical en français permet de présenter une typologie pragmatiste de ces interventions sur la grammaire en langue française : tandis que la rédaction épicène vise l’élision de la marque du genre, la féminisation ou « démasculinisation » (Louise-L. Larivière 2000) cherche à marquer le féminin (grammatical) ; la créativité linguistique non-binaire vise elle aussi à (re)marquer des positionnalités invisibilisées, mais elle marque plutôt des genres qui s’expriment au-delà de la binarité homme/femme, optique à laquelle l’approche du tumulte graphique (Julie Abbou 2011) par et pour des « genres dérangeants » (Alice Coutant 2019) s’oppose diamétralement. Le troisième chapitre s’attarde au pan théorique de la question de recherche et questionne la manière dont le point de vue linguistique sur la marque du genre façonne la conceptualisation du sexe/genre. Je propose que la mobilisation de la sémiotique peircienne (Charles S. Peirce 1992), lue au prisme des études féministes et trans via les travaux séminaux de Teresa de Lauretis (1987, 2007), permet l’examen de la co-production du système de genre et des normes linguistiques plutôt que de considérer les recommandations de communication inclusive comme un simple reflet d’un changement de paradigme culturel et social relativement au genre ou de conjecturer sur le genre (politique) sur la base de l’étude des stratégies linguistiques elles-mêmes. Le terrain privilégié pour l’analyse est le guide, considéré à la fois comme un « genre textuel » (Daniel Elmiger 2022) à part entière, au seuil du descriptif et du prescriptif, et comme un jeu de langage (Ludwig Wittgenstein 1961) à la charnière du témoignage et du texte de loi, propice à l’étude d’interprétants du sexe/genre en cours de « dé-re-construction » (de Lauretis 1987, p. 24). Le quatrième chapitre mobilise les classements présentés dans les deux premiers chapitres et le cadre sémiotique présenté dans le troisième chapitre pour mettre en évidence le travail de la marque du genre dite neutre dans neuf guides de communication inclusive produits entre 2020 et 2021. Le genre neutre comme un troisième ensemble d’identités de genre en sus de « homme » et « femme » est particulièrement présent dans le travail de l’effet de sens de notions d’épicène et de genre neutre grammatical. Aussi, si le travail de la notion de neutralité de genre est informé par une multitude d’agent·es avec des intérêts différents, voire contradictoires, on doit souligner que des pratiques de genrement issues des communautés trans y contribuent explicitement, tantôt en tension, tantôt en congruence avec les discours féministes sur la marque du genre. Enfin, la figure « non binaire » intervient dans les guides de communication inclusive, non pas comme une figure de transgression du système de genre ou un porte-étendard du dépassement de la marque du genre (grammatical), mais plutôt comme un troisième membre du système de genre pour justifier l’ajout d’un troisième genre grammatical, dans le contexte anglonormatif dans lequel ces contributions non binaires sont articulées

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